Franckel Jeanrisca, l’homme qui veut rendre l’argent plus proche des Haïtiens
- Jeff Rinvilien
- il y a 5 jours
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Parmi les rêves qui naissent en silence et deviennent des solutions concrètes, celui de Franckel Jeanrisca a désormais un nom : CSH Dirèk.
Quand on lui demande pourquoi il a lancé ce projet, Franckel Jeanrisca ne parle pas d’ambition personnelle, ni de chiffres. Il raconte plutôt les files d’attente interminables devant les banques, les frustrations quotidiennes de millions d’Haïtiens pour retirer ou envoyer un peu d’argent, et ce sentiment d’exclusion qu’éprouvent ceux qui vivent loin des circuits bancaires.
« Ce n’est pas normal que gérer son propre argent soit un privilège », dit-il, assis dans un coin calme de la salle de conférence de l’hôtel Karibe, juste après le lancement officiel de CSH Dirèk, le 28 mai 2025.
L’événement a réuni du beau monde : personnalités politiques, artistes, journalistes, membres de la diaspora. Mais derrière les discours officiels, c’est bien l’histoire d’un homme, et de son engagement, qui donne à ce projet toute sa valeur humaine.
CSH Dirèk, ce n’est pas une application mobile de plus. C’est une réponse directe à un besoin vital : l’accès universel à l’argent. Avec un téléphone portable, chacun peut désormais transférer, recevoir ou retirer de l’argent, même depuis les montagnes de Kenscoff ou les plaines du Sud.
« Je viens d’une famille modeste. J’ai vu ma mère marcher des kilomètres pour toucher un virement. J’ai vu des marchandes perdre leur capital à cause d’une erreur bancaire. J’ai toujours pensé qu’on pouvait faire mieux. »
Il a fallu six ans pour concrétiser cette idée. Depuis 2019, Franckel commence à travailler avec d’autres compatriotes vivant à l’étranger. Il leur parle de son rêve : créer une passerelle entre l’argent, la technologie et les oubliés du système. Ensemble, ils tracent les premières lignes d’une fintech pensée par et pour les Haïtiens, qu’ils soient en Haïti ou ailleurs.
Ce 28 mai, entouré de ceux qui ont cru à ce rêve, des membres du gouvernement comme la ministre des Haïtiens vivant à l’étranger, des artistes, des figures médiatiques, Franckel ne cache pas son émotion.
« Ce projet, c’est notre manière de dire que ce pays n’est pas fini. Haïti est encore capable de créer, d’innover, de surprendre. »
Ceux qui l’entourent confirment. L’avocat Yves Emmanuel Adeclar, qui soutient légalement la démarche, parle de CSH Dirèk comme d’un acte de résistance économique. La responsable d’association Jocelyne Jean Louis, elle, voit dans cette initiative un outil de soulagement pour les couches les plus vulnérables.
« Madan Sara, peyizan, ti komèsan… yo tout ap jwenn plis libète ak zouti sa a. »
Pour Franckel, l’aventure ne fait que commencer. CSH Dirèk, c’est d’abord un symbole : celui d’une diaspora qui ne se contente plus d’envoyer de l’argent, mais qui construit des ponts durables avec le pays. Celui aussi d’une jeunesse haïtienne qui choisit de créer des solutions, plutôt que de fuir.
« Nous ne sommes pas là pour remplacer les banques. Nous sommes là pour inclure ceux qu’elles ont longtemps ignorés. »

Jeff Rinvilien
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