Corruption en série : l’ULCC dénonce une gestion scandaleuse dans plusieurs institutions publiques

L’Unité de Lutte contre la Corruption (ULCC) a publié une série de rapports accablants cette semaine, mettant en lumière une gestion chaotique révélant des irrégularités concernant plusieurs institutions de l’administration publique haïtienne. Ces enquêtes menées sur une période de plusieurs mois révèlent des cas d’abus de fonction, de détournement de fonds publics, de falsification de documents et de passation illégale de marchés. Chaque dossier met en cause des responsables qui, selon l’ULCC, ont trahi la mission de service public.

Le mandat du Dr Carl François à la tête de l’OFATMA est sévèrement mis en cause. L’enquête de l’ULCC montre qu’il a attribué illégalement des contrats à des prestataires proches, notamment dans le secteur de la restauration, en dehors de tout processus de passation de marchés conforme aux lois en vigueur. Les entreprises Valcuisine et Oley Event & Food Services ont été citées comme bénéficiaires irrégulières de contrats publics, sans appels d’offres ni justification administrative.

L’ULCC demande la mise en mouvement de l’action publique contre le Dr François pour abus de fonction, passation illégale de marchés et prise illégale d’intérêts. Elle recommande aussi de poursuivre Valmine Jean Jacques et Valérie Nadia Victor pour faux et usage de faux, et d’ordonner le gel des comptes bancaires des deux entreprises impliquées.

Autre affaire gravissime : à la Direction de l’Immigration et de l’Émigration, Stéphane Vincent et ses collaborateurs ont orchestré la fabrication frauduleuse de 556 passeports avec de faux timbres de la DGI. Ce montage a été réalisé entre septembre et novembre 2024, période durant laquelle les agents de la DGI étaient en grève. Un compte fictif au nom de Fernando Victor, créé par Vincent, a servi à contourner le système.

L’ULCC demande l’ouverture de poursuites judiciaires contre Stéphane Vincent, mais aussi Mariantha Méroné, Lesly Saint-Juste et Rubens Pauléon pour leur implication directe ou indirecte dans la production frauduleuse de documents officiels.

Dans un autre rapport, l’ULCC dévoile des pratiques financières douteuses dans plusieurs centres administratifs de la DIE (Delmas, Tabarre, Pétion-Ville, et le siège à Lalue). Des sommes considérables ont été dépensées sans aucune justification ni pièce comptable. À Delmas, 300,000 gourdes ont disparu sans trace. À la rue Lamarre, 365,000 gourdes sur un total de 475,000 destinés au paiement de policiers détachés n’ont pu être justifiés. À Tabarre, des millions ont été versés sous forme de "gratifications" sans signatures ni preuves de paiement.

L’ULCC recommande l’engagement de poursuites pénales contre les responsables de centres identifiés (dont Jean René Laguerre, Jude Marcelin) et appelle à un audit exhaustif de tous les fonds décaissés sous la gestion de Stéphane Vincent. Elle exhorte également à renforcer les mécanismes de contrôle budgétaire et administratif dans tous les centres de traitement de documents publics.

Enfin, l’enquête la plus retentissante concerne l’Office de la Protection du Citoyen (OPC), dirigé à l’époque par Renan Hédouville. Sur 17 voyages budgétisés entre 2022 et 2024, 10 n’ont jamais eu lieu. Pourtant, des fonds estimés à 16,6 millions de gourdes ont été décaissés pour couvrir des frais de billets d’avion et de per diem. Des agences comme Sans Souci Voyages ont émis des documents pour des voyages fictifs, aggravant le préjudice financier.

L’ULCC appelle à la mise en mouvement de l’action publique contre Renan Hédouville, Régine Hédouville, Juliana Thomas Simplice, Tex Willer Célafoi Louis, Mimose Moyard, Jean Jolin Dodier et Hugues Narcisse. Elle recommande une vérification des opérations de l’agence Sans Souci, et la récupération des sommes détournées par voie judiciaire.

PLR